Femmes rurales et développement agricole, mage illustrative.
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Commune rurale de Dougouolo : la résilience des femmes face à la crise alimentaire

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Cette année, la campagne agricole s’est achevée sur une note d’inquiétude, dans la commune rurale de Dougouolo, cercle de Bla. La production a été déficitaire pour les cultures vivrières ainsi que commerciales, à cause de l’arrêt précoce des pluies. Si la plupart des jeunes ont choisi le chemin de l’exil, les femmes de la commune ont préféré s’organiser pour faire face à la crise alimentaire qui profile à l’horizon. Organisées en associations, elles s’activent dans les marchés pour le petit commerce et autour des points d’eau pour faire le maraichage.

La commune rurale de Dougouolo est située dans le cercle de Bla, région de Ségou. Cette commune de six villages, basée sur l’agriculture, l’élevage et le commerce, a une population de  12 296 habitants, soit 5 902 hommes et 6 394 femmes, selon le rapport du rôle numérique de 2021 élaboré par la mairie elle-même. Ici, à l’image de plusieurs autres localités du cercle et de la région, la pluviométrie a été très déficitaire et par conséquent, la production agricole.

Production déficitaire

Selon plusieurs témoignages de villageois, aucune famille n’a atteint le niveau d’autosuffisance alimentaire à plus forte raison d’écouler un excédent sur le marché. La situation frôle la catastrophe, nous a-t-on indiqué. Dans ces conditions, la question qui taraude les esprits est comment faire face aux charges (nourriture, habillement, santé, frais scolaire, etc.) ? Sans apport extérieure, la crise alimentaire est inévitable, est convaincue le maire Salif Dao. En effet, selon lui, avec l’arrêt précoce des pluies, le rendement annuel a été déficitaire par rapport à l’année dernière. Ainsi, pour les céréales (maïs, mil, sorgho, etc.), le rendement était de 6 869 378 tonnes l’année dernière contre 4 576 500 tonnes, soit une différence de 2 292 878 de tonnes cette année. A cela s’ajoute le déficit chronique de production dans les cultures commerciales (coton, arachide, piment, gombo, etc.), a fait savoir le maire Dao.

Dans les domaines où les femmes s’activent le plus, pendant l’hivernage, le rendement est presque négatif, selon Fatoumata Konaté, une ressortissante du village de Petésso. Selon elle, ce rendement négatif s’explique par le fait que le semi ou la plantation de ces cultures sont toujours programmées à la dernière position après avoir terminé les semis pour le coton et les céréales. C’est pourquoi, l’arrêt précoce des pluies impacte négativement sur elles, nous rapporte-t-elle, avant d’ajouter que son champ de deux hectares d’arachide n’a donné que des feuilles (ne pouvant servir que pour les animaux).

Les femmes à la rescousse !

Selon la présidente de Ben bè sekola de Petesso, Mariam Sogoba, au regard de la situation socio-économique peu favorable dû à la mauvaise campagne agricole, les femmes, qui ont vite pris conscience de la situation, ont déjà commencé à se mobiliser pour faire le petit commerce ou le maraichage.

« Il faut faire quelque chose pour aider la famille », a-t-elle confié au Jalon.com.

Dans le village de Peguena, les femmes s’activent autour d’un jardin de deux hectares disposant d’un puits à grand diamètre. Ici, les femmes produisent de la tomate, des échalotes, des aubergines et des papayes, nous a confié la présidente de l’association Koto gnongontala, Salimata Dembelé. En plus de ce jardin collectif, plusieurs femmes disposent des exploitations individuelles à côté, nous a-t-elle confié. Mais l’autre difficulté, selon elle, demeure l’écoulement des produits, puisque c’est la liquidité qui se fait rare.

« Nous avons les enfants à l’école à qui on doit faire face aux dépenses scolaires et d’autres charges  financières de la famille. Ici, à Peguena, nous nous organisons pour faire le maraîchage, dont les revenus nous permettent de payer la tontine qui finance nos petits commerces.

Nous achetons de l’arachide qu’on décortique pour le revendre la graine sur le marché. Une partie de ces graines est transformée en cacahuète aussi », a témoigné Salimata Dembelé.

Une longue expérience !

A l’association Trongo Farakolo de Dougouolo, c’est la tontine (tègèrèni) qui réunit les femmes une fois par semaine. Les fonds de cette tontine permettent de financer les activités de petit commerce (vente de fruits et légumes, habits, divers produits alimentaires), nous a confié sa présidente, Adjara Sanogo.

« depuis quelques années, nous faisons ces activités, mais cette année, nous avons vite compris qu’il faut mieux s’organiser pour faire face à une situation particulièrement  préoccupante. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle, nous profitons de cette occasion pour appeler les ONG de la zone à nous accompagner avantage afin de nous tirer d’affaires », a-t-elle préconisé.  Elle ajoutera que dans ces genres de circonstances, les femmes ont aussi un rôle, d’appui et de veille, pour faire en sorte que le peu de céréales récolté ne se retrouve pas sur le marché pour que la famille ne se retrouve pas dans le besoin plutôt que prévu. 

« C’est pourquoi nous ne pouvons pas croiser nos bras pour observer la situation », a conclu Adjara Sanogo.

Il faut rappeler que les associations féminines de la commune de Dougouolo ont une longue expérience dans l’organisation pour les activités génératrices de revenus. En effet, depuis les années 1990, les premières organisations ont vu le jour grâce aux agents du Centre de formation des animatrices rurales de Dougouolo (CFAR). Financé par le Canada, de nombreuses femmes ont été initiées par cette ONG au maraichage, à l’alphabétisation et surtout aux notions de santé de la reproduction.

« Ce reportage est publié avec le soutien de JDH, Journalistes pour les Droits Humains et National Endowment for Democracy – NED ».