Sans combinaisons médicales, ni masques adaptés, le personnel sanitaire de l’hôpital régional de Kayes affirme travailler dans une condition lamentable dans son combat contre le coronavirus, l’une des pandémies les plus ravageuses après la grippe espagnole en 1918.
A ce jour, près de dix personnes malades du coronavirus sont alitées à l’hôpital Fousseyni Daou de Kayes dont sept membres du personnel soignant. Les conditions de leur prise en charge sont effroyables. L’appui promis par l’Etat se fait attendre malgré l’important fonds mobilisé ces dernières semaines pour faire face à la pandémie.
Face à la situation, la société civile de la région a haussé le ton à travers un sit-in tenu ce lundi devant la structure sanitaire. Objectif : exiger plus de moyens de ressources, de matériels à l’équipe de prise en charge du covid-19.
« Trop de mensonge », « Kayes face à un danger », « Kayes fait partie du Mali », « Nos vies ont été mises en danger », « Kayes ne mérite pas ça», « Nos patients souffrent », pouvait-on lire sur des bandéroles des manifestants .
Ibrahim Maiga, l’un des manifestants joint par Lejalon, explique «Nous avons été choqués, indignés par la sortie d’un responsable sanitaire sur les conditions difficiles de travail de l’équipe de prise en charge du covid-19. C’est pourquoi, nous avons décidé de sortir pour rappeler à l’Etat ses engagements en décrétant l’état d’urgence sanitaire ». Pour lui, il est inadmissible que le personnel de la santé travaille sans une condition minimum de protection face à une pandémie ravageuse. « La région de Kayes est solidaire avec tout le personnel soignant », clame-t-il
De son côté, le Secrétaire général des travailleurs de l’hôpital Fousseyni Daou, Gueladjo Traoré ajoute : «Il n’y a aucun dispositif sanitaire en place dans l’hôpital de Kayes contre le coronavirus. Les conditions de travail et de traitement sont très difficiles pour le personnel et même pour les patients. Je ne peux pas comprendre que l’Etat ne nous donne pas de matériels, ni de formation».
Conséquence, déplore-t-il, sept agents de santé, sous traitement du coronavirus sont abandonnés à leur triste sort. Pour autant, ils ont été infectés dans une mission de l’Etat malien. Malgré cela, «aucune compassion des autorités locales », indique M. Traoré la gorge nouée. Quelques secondes de silence. Pis, il ajoute « ce qui se passe à Kayes est inhumain ».
A l’absence de combinaisons médicales, le travail est difficile parce qu’il faut éviter d’être en contact avec les patients. « Depuis le dimanche dernier, on est obligé de faire le tour du bâtiment (où les malades sont logés) et c’est par la fenêtre que les patients sont servis en nourriture. Parce qu’on n’a aussi de masqué adapté », déclare le syndicaliste d’un ton à peine audible. De même, il a déploré qu’ils sont aussi en manque de médicaments. Depuis le début de la pandémie, il indique attendre toujours désespérément les dotations du département de la santé comme promis.
A défaut de les avoir, l’équipe de prise en charge se débrouille avec ses moyens de bord pour acheter les médicaments avec l’argent de la caisse de l’hôpital, précise-t-il. « On prend les médicaments à la pharmacie de l’hôpital. Ou souvent, c’est le caissier qui prend l’ordonnance pour aller acheter les médicaments dans les pharmacies de la ville», dénonce-t-il.
Ces dépenses supplémentaires ont presque asséché la caisse de l’hôpital, a-t-il affirmé. Et maintenant les prélèvements font deux jours souvent avant d’être envoyés à Bamako à cause des difficultés de trésorerie.
Paradoxalement, relève-t-il, des milliards sont annoncés par le gouvernement pour la prise en charge de cette maladie alors qu’eux (les agents de la santé) sont dans les conditions « exécrables». Pour lui, tout se passe comme si la région de Kayes ne fait pas partie du Mali.
En revanche, le directeur adjoint de la santé, Dr Abdoulaye Guindo, est surpris de la nouvelle parce qu’il nous affirme avoir « lui même envoyé les dotations » pour la région de Kayes. « Mais je ne sais pas sur place quelle gestion a été faite des envois », a-t-il déclaré.