Sur le plateau de la chaîne privée M7 TV, l’activiste Tahirou Bah a affirmé que la fourniture de l’électricité n’est pas « un droit ». Il soutient qu’il existe un rapport client et fournisseur entre l’Energie du Mali (EDM) et ses abondés et qu’en conséquence la fourniture de l’électricité ne peut en aucun cas être un droit du citoyen vis-à-vis de l’Etat. Les textes et les juristes prouvent le contraire.
Le Mali traverse sa plus grave crise énergique. Depuis plusieurs mois, des quartiers de la capitale et des grandes villes à l’intérieur peuvent cumuler jusqu’à 48heures voire plus sans électricité. C’est dans ce contexte difficile pour les populations et les entreprises que Tahirou Bah, activiste surtout sur la toile et sur les plateaux a tenté de dédouaner l’EDM-SA, société étatique de sa responsabilité première de fourniture d’électricité aux Maliens.
« La fourniture d’électricité n’est pas un droit », a-t-il affirmé, le 25 avril sur le plateau de M7-RMC, une chaîne privée du Groupe Renouveau. Dans son argumentaire, Tahirou Bah justifie sa déclaration sur le fait que l’EDM, dans son contrat, traite les abonnés de son réseau de « clients ».
L’électricité, un droit pour les citoyens
Les propos de Tahirou Bah ne convainquent pas beaucoup de personnes, en tout cas pas les spécialistes du droit. Pour le Dr en droit public, Mahamadou Konaté, « aucun texte n’a dit que l’électricité est gratuite ». Il soutient que la fourniture d’électricité, tout comme celle du service de la santé est un droit pour le citoyen.
« Mais cela ne signifie pas que le citoyen ne paie pas de médicaments ou des frais d’opération si nécessaires », précise-t-il. Dr Konaté a même fait recours à l’article 4 de l’ordonnance N°00-019/P-RM du 15 mars 2000 portant organisation du secteur de l’électricité qui stipule que : « La production, le transport, la distribution, l’importation, l’exportation et la vente d’électricité en vue de satisfaire les besoins du public constituent un service public de l’État dont il confie l’exercice à des opérateurs dans le cadre soit d’une Concession de service public, soit d’une autorisation, délivrées dans les conditions prévues par la présente ordonnance ». Il explique ainsi l’esprit de cet article : « Selon l’article 4 de cette ordonnance de 2000, la fourniture de l’électricité est un service public de l’État, de la production à la vente ; autrement dit, c’est une obligation de l’État envers ses citoyens (évidemment, selon sa capacité). L’État peut néanmoins déléguer ce service ou autoriser des acteurs privés à y participer », explique Dr Konaté.
L’article 7 de la même ordonnance qui stipule : « L’État assure la fonction de maître d’ouvrage du service public de l’électricité. Dans les centres ruraux et semi-urbains, l’État peut, dans le cadre de la décentralisation, déléguer la fonction de maître d’ouvrage aux collectivités territoriales décentralisées. Le maître d’ouvrage assume vis à vis de la collectivité, la responsabilité ultime de la gestion, de la maintenance et du développement des installations d’électricité ainsi que, de manière générale, de toute activité nécessaire à leur fonctionnement adéquat .»
Selon Dr Konaté, «ici, la qualité de maître d’ouvrage est une autre obligation de l’État, qui fait qu’il doit s’occuper de la gestion et de la maintenance de tout le réseau de distribution de l’électricité, à moins qu’il délègue ce rôle à une mairie ou à un conseil régional ( le cercle étant maintenant supprimé comme collectivité territoriale) ».
Cette ordonnance est toujours en vigueur puisqu’il a été prorogée en 2021 pour cinq ans, selon, d’information disponible sur le site de EDM-SA, une société dont l’Etat malien est l’actionnaire unique depuis 2018.
Donc, au regard de cette Ordonnance, la fourniture d’électricité est une obligation pour l’État contrairement à ce que fait croire Tahirou Ba qui fait du citoyen un simple « client » de l’EDM.
B. Guindo