Dans sa volonté d’instaurer la justice sociale, l’Etat du Mali, à travers, le décret n°2021-0662/PT-RM du 23 septembre 2021 fixant les modalités d’application de la Loi n°2018-027 du 12 juin 2018 relative aux droits des personnes vivant avec le handicap, confère des avantages aux personnes diplômées vivant avec un handicap pour l’emploi dans les fonctions publiques de l’Etat et des collectivités. Cinq ans après la promulgation de ladite loi et deux ans après l’adoption d’un décret d’application où en sommes-nous avec la situation des diplômés vivant avec le handicap au Mali en général, et les déficients auditifs en particulier ?
A la suite de l’adoption de la Loi n° 2018-027 du 12 juin 2018 relative aux droits des personnes vivant avec un handicap et le Décret n°2021-0662/PT-RM fixant les modalités d’application de la Loi n°2018027 du 12 juin 2018, relative aux droits des personnes vivant avec le handicap, un quota de 15% de l’effectif des admis au concours d’entrée aux fonctions publiques de l’Etat et des collectivités territoriales, a été réservé aux diplômés de cette catégorie sociale.
Selon un responsable du Centre national des Concours de la Fonction publique, dans le cadre de l’application de cette décision, 62 personnes, sur une prévision de 100 agents, ont été d’abord intégrées par un arrêté interministériel.
Sur les 62 intégrés, une sourde muette : Mme Michelle N’KOU, ingénieure élevage corps zootechnie. Les diplômés handicapés ont été recrutés dans la plupart des corps de la fonction publique, à l’exception de la douane. Ces 62 nouveaux agents sont dans les corps des Contrôleurs du trésor, des Gestionnaires de Ressources humaines, Secrétaires d’administration, Attachés d’administration, Administrateurs de l’Action Sociale, des Contrôleurs de finances, des Techniciens de construction civile, des informaticiens, des agents des Eaux et Forêts, des Electromécaniciens dans les industries minières, des Médecins, des pharmaciens, des infirmiers d’État, des agents de la Santé publique.
A la Direction de la Fonction publique de l’Etat et à celle des Collectivités territoriales, l’on reconnait que l’intégration des diplômés vivant avec le handicap dans la fonction publique répond à la volonté des autorités de réparer une injustice sociale.
Selon Sidy Moctar Coulibaly, président de la Fédération des personnes diplômées vivant avec le handicap, le taux de chômage des personnes vivants avec un handicap est plus élevé que celui des travailleurs valides : au 31 décembre 2021, 724 jeunes vivant avec le handicap étaient à la recherche d’emplois.
Depuis la ratification en 2007, par le Mali, de la Convention des Nations-Unies relative aux droits des personnes handicapées et l’avènement de la loi N°027 du 12 juin 2018 dont le décret d’application a été signé en 2021, il y a eu essentiellement trois grands mouvements de recrutement des personnes diplômées vivant avec un handicap à la Fonction publique : il s’agit de la dérogation accordée par le gouvernement de Mme Sidibé Mariam Kaidama CISSE qui portait sur un quota de 70 personnes, 28 en 2019 et les 62 agents en 2022.
Famory Konaté, Président de l’Association Malienne des sourds (AMASOURDS), pense qu’il y a encore des efforts à faire pour que les personnes diplômées vivant avec un handicap soient sur le même pied d’équité avec le quota des 15% accordés par l’Etat dans les différents concours de la fonction publique au Mali.
Discriminations contre les déficients auditifs ?
Selon M. Konaté, Président de l’AMASOURDS, les diplômés déficients auditifs font le concours à chaque recrutement dans la fonction publique de l’Etat et des Collectivités territoriales sur la base de l’égalité avec les autres. Ainsi, depuis, une quinzaine ont postulé et seulement cinq ont été admis dans le corps des enseignants, des informaticiens et des métiers d’art. «En matière d’emploi, les personnes sourdes sont les dernières embauchées et les premières congédiées à cause des difficultés de communication », a-t-il déploré.
D’autres difficultés dont souffrent les déficients auditifs, selon lui, sont relatives à l’absence de la langue des signes dans les écoles de formation des maîtres, la non reconnaissance de la langue des signes comme langue maternelle des personnes sourdes, la non prise en charge des interprètes en langue de signes par l’Etat, l’absence de traducteur de l’information télévisée en langue des signes.
Selon Rokia Maïga du Comité des Femmes sourdes du Mali, l’Etat doit accorder spécifiquement un quota aux diplômés sourds dans les fonctions publiques de l’Etat et des collectivités puisque les personnes sourdes sont discriminées dans la grande famille des personnes vivant avec le handicap.
Selon une source de la Direction du Développement Social, il faut un arrêté interministériel signé par les ministères de la Fonction publique, de Santé et du développement social et des Finances pour l’intégration des personnes handicapées. La multiplicité des acteurs, à ce niveau, fait que personne n’est responsable de rien et finalement les choses les plus élémentaires trainent.
Sidi DAO
« Ce reportage est publié avec le soutien de Journalistes pour les Droits Humains (JDH) au Mali et NED »