Cohésion sociale : le fact-checking mis à contribution

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Au Mali, des initiatives de lutte contre la désinformation se multiplient auprès des populations locales.

Rumeurs, messages de haine et fausses informations foisonnent sur les réseaux sociaux et dans les groupes de messagerie. Un cocktail explosif dans un pays fortement secoué par le terrorisme et des conflits au relent intercommunautaire. Face à cette situation, des organisations non gouvernementales s’investissent et mettent à contribution le fact-checking pour apaiser les tensions. C’est le cas de Search for Common Ground, porteur du projet « Renforcer la résilience communautaire face à la désinformation. ». L’initiative mobilise soixante-quinze journalistes radios et des blogueurs.

Formés aux techniques de fact-checking, leur mission consiste à identifier et traiter les rumeurs et fausses informations relayées à l’échelle locale. Ils identifient, traitent et diffusent sur des réseaux sociaux ou les ondes des radios dans les langues locales. Avec pour finalité : donner des informations vérifiées aux populations dont une grande majorité n’est pas instruite. Cela, afin de maintenir la flamme de la cohésion sociale dans certaines communautés des régions du Nord et du centre du Mali, frappées de plein fouet par la crise sécuritaire, elle-même parfois exacerbée par les fausses informations.

« Nous avons constaté que les populations de certaines zones ne se sentent pas suffisamment informées sur les éléments clés des différents processus de paix (situation sécuritaire, processus de DDR, mécanismes de stabilisation et la multiplication des fausses informations et rumeurs », explique Ibrahim Ag Amadou, manager project chez Search for Ground.  

Outre les journalistes et blogueurs, l’initiative mise en œuvre avec la Collaboration de la Cellule nationale d’Alerte précoce implique aussi des leaders communautaires formés et sensibilisés pour relayer des informations fiables et contrer les discours de haine qui sèment désunion et psychose au sein des communautés.

A titre d’exemples : en 2021, une fausse information partagée sur les réseaux sociaux accuse la MINUSMA d’être « impliquée » dans une prétendue attaque terroriste contre les chasseurs traditionnels dans le cercle de Bakass au Centre du Mali ».

Tandis qu’une autre, cette fois-ci, une photo sur laquelle apparaît un homme amputé de la main est présenté sur les réseaux sociaux comme une victime des groupes djihadistes qui se seraient installés à Siribala, ville située à quelques kilomètres de Ségou. Alors qu’il s’agissait en réalité d’une dispute entre deux amis qui a mal tourné.

Aussi, certains clichés diffusés dans des médias professionnels dont les auteurs ignorent parfois le poids de certains mots et le contexte local ravivent les tensions et relève de la désinformation. Parmi lesquels les termes : rebellions Touaregs, terroristes peuls ou encore village dogon, village peul. L’utilisation courante de ces mots dans des médias stigmatise et met en danger la vie des communautés concernées.

D’où l’intérêt du fact-checking qui se veut désormais être un rempart contre la désinformation.

Lassina Niangaly

Major de la 3ème Promotion de la Formation en Alternance de l'Ecole supérieure de journalisme de Lille à Bamako en 2018, Lassina NIANGALY, 33 ans, est journaliste depuis août 2012. Il est titulaire d'une maîtrise en Histoire-Archéologie et d'un Bac+5 en Histoire et Géographie. A la base professeur d'enseignement secondaire.