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Mali/France : Barkhane quitte le Mali, mais reste au Sahel

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Ce 15 août 2022 marque le départ des derniers militaires français de l’opération BARKHANE du Mali après neuf années de présence mrquée. Si cette présence a suscité des interrogations au Mali du fait de l’immense défi sécuritaire à relever, l’état-major général des armées françaises ne manque pas de se féliciter des exploits de ses hommes mobilisés pour la traque des narcojihadistes sur un territoire aussi vase que celui du le Mali.

Suite à la détérioration des relations diplomatiques et politiques  entre le Mali et la France, Paris, par la voix du président Emmanuel Macron, a annoncé le 17 février 2022, son intention de quitter notre pays. Alors que le Bamako évoque un « lâchage en plein vol » de la part de l’ancienne métropole du fait de sa décision « unilatérale », Paris accuse les autorités de la transition malienne d’avoir noué un partenariat avec des mercenaires russes.

Depuis plusieurs mois, les positions des deux pays est inconciliables. C’est dans un tel climat de brouille diplomatique que la force Barkhane quitte le Mali. Ainsi, depuis le 15 août 2022, il n’y a plus de soldat de l’opération Barkhane au Mali comme souhaité par Paris. La Franc a évacué les bases maliennes qu’elle occupait « en bon ordre », dit-on. Le dernier camp militaire de cette opération (Gao) a été démonté, depuis la première semaine du mois d’août 2022, ont annoncé plusieurs médias nationaux et étrangers. Ces bases militaires ont été remises à l’armée malienne, selon des sources sécuritaires.

Barkhane quitte le Mali, mais s’installe au Burkina et au Niger voisins où elle compte poursuivre son combat contre les narcojihadistes qui ont envahi le sahel suite à la chute du régime de Kadafi, précise les autorités françaises.

« Aujourd’hui, lundi 15 août 2022, les derniers militaires français de l’opération BARKHANE présents au Mali ont quitté le pays et franchi la frontière nigérienne », annonce le chef d’état-major général des armées françaises, dans son communiqué en date du 15 août 2022.

Une intervention saluée

Il est important de rappeler qu’en 2013, l’armée française, à travers l’opération Serval, s’est engagée au Mali à la demande des autorités du pays, pour combattre des groupes armés terroristes qui occupaient la moitié de son territoire et menaçaient Bamako. Cette  première intervention, qui consistait  à arrêter le déferlement des colonnes de terroristes sur la capitale, a été appréciée par les deux parties malienne et française. En témoigne l’accueil historique réservé au président français, François Hollande au Mali en 2013.

A cette occasion, Hollande ne pouvait cacher sa joie : « L’opération Serval a été pleinement réussie. Sur le plan militaire, puisque très rapidement nous avons pu repousser les terroristes puis ensuite sécuriser l’ensemble du territoire malien, sur le plan politique, puisque nous avons été capable de faire une grande coalition […] pour permettre l’élection, dans le délai qui avait été prévu, et avec un résultat incontestable, et par l’ampleur de la victoire d’Ibrahim Boubacar Keïta, et par le niveau de la participation », a rappelé François Hollande, avant d’ajouter: « je ne pense pas qu’il existe de situation qui ait pu avoir ce succès en aussi peu de temps, entre le 11 janvier et le 11 août ».

La brouille

A la suite, Serval a été articulée en Barkhane pour couvrir l’ensemble du Sahel (le Mali, le Niger, le Burkina-Faso, la Mauritanie et le Tchad). La suite est connue, la force antiterroriste française est incapable de stopper l’invasion du Sahel par les terroristes. Confiné au seul nord du Mali, les narcojihadistes finirent par occuper le centre et l’Ouest avant d’atteindre le Burkina, le Niger et menacent le Golfe de Guinée. Au même moment, Barkhane continuait de se contenter de l’élimination de quelques responsables terroristes.    

Au fil des années, le débordement du terrorisme du nord vers le centre et le sud du Mali fini par convaincre une bonne partie de l’opinion malienne de l’incapacité des forces étrangères à contenir l’hydre terroriste au Mali ou du moins d’une nécessité de changement de tactique pour venir à bout de narcotrafiquants jihadistes.

La France a-t-elle démérité au Mali ? Après ce départ controversé, il convient de reconnaitre le sacrifice des soldats français engagés pour la cause malienne, dont certains ont laissé la vie et d’autres handicapés à vie.

Hommages aux soldats tombés

« Nous avons lutté avec succès avec les forces armées de ce pays, et aux côtés de nos partenaires africains, européens et nord-américains, pour les empêcher de prendre le contrôle du Mali. Nous avons sans relâche combattu l’État islamique dans le Grand Sahara et le Rassemblement pour la victoire de l’islam et des musulmans, les empêchant d’abattre l’État malien. Nous avons également appuyé la montée en puissance des forces armées maliennes pour qu’elles puissent à terme protéger la population. Ces réussites opérationnelles obtenues sur le sol malien, dans des conditions souvent éprouvantes, sont le fruit de l’engagement sans faille de tous les soldats, marins et aviateurs qui y ont servi », se félicite chef d’état-major des armées françaises.

A l’état-major français de rendre un hommage mérité à ces soldats tombés au Mali avant de saluer la bravoure des hommes engagés : « À l’heure où se clôt ce chapitre important de BARKHANE, je veux rappeler le sacrifice ultime des 59 militaires français tombés au Sahel. Ils sont allés au bout de leur engagement. Nous ne les oublierons pas, nous n’oublierons pas leurs familles et nous continuerons à évoquer avec respect le souvenir de ces frères d’armes. Je veux aussi dire à tous nos blessés que nous resterons à leurs côtés. Nous tiendrons les promesses de notre engagement comme eux ont accompli leur devoir. Nous continuerons de soutenir leurs proches ».

Réarticulation de Barkhane

La France part du Mali, mais reste au Sahel. Suite à la brouille diplomatique avec les autorités de la transition du Mali, la France a opté pour une « réarticulation » de sa force antiterroriste au Sahel pour continuer à lutter contre le terrorisme. C’est en tout cas, la volonté de l’état-major français qui ne manque pas d’apporter son soutien au commandant de la force Barkhane, le général Baratz. Toutefois, le chef d’état-major des armées françaises reste convaincu qu’une victoire définitive et durable sur les force du mal ne saurait être réelle sans les armées africaines-elles-mêmes.

 « Il a toute ma confiance pour continuer la lutte contre les groupes armés terroristes en appui des pays du Sahel. En effet, la lutte contre le terrorisme reste une priorité de la France, mais il est certain que ces groupes ne pourront être durablement défaits que par les armées africaines elles-mêmes », a soutenu le communiqué de l’état-major des armées françaises. Avant de poursuivre : « Conformément aux orientations du Président de la République, l’action de l’armée française va évoluer pour s’inscrire toujours plus en accompagnement des pays africains dans leur quête de sécurité et de stabilité. Notre action militaire s’articule désormais autour de propositions de formation et d’entraînement conjoints, ainsi que d’appui et d’accompagnement au combat des armées des pays partenaires lorsqu’elles le sollicitent. Nous devons coordonner ces formes de coopération avec nos alliés européens. Dans cet esprit, nous nous plaçons déjà en soutien de plusieurs forces armées nationales qui décident pleinement des opérations qu’elles conduisent. L’évolution du volet militaire de l’action française s’inscrit dans un continuum large entre l’offre diplomatique, des partenariats rénovés et des actions de développement afin de bâtir, dans la durée, une intimité plus forte avec les armées africaines. Cette stratégie repensée répond aux évolutions de la menace en Afrique de l’Ouest, notamment aux nouvelles velléités territoriales des groupes terroristes dans les pays du Golfe de Guinée ».

A Bamako, ce départ est diversement apprécié, pour certains, c’est un ouf de soulagement, car c’est la France qui empêche l’armée malienne de quadriller l’ensemble du territoire nationale. Par contre, d’autres pensent que ce départ laisse un vide qu’il faut impérativement combler très vite. Pour cela, il convient pour les Maliens de se donner la main pour relever le défi.