Dr Aly Tounkara, expert défense et sécurité au Centre des études sécuritaires et stratégiques au Sahel. © Maliki Diallo.
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Dr Aly Tounkara : « les terroristes sont acculés » au Mali

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L’expert défense et sécurité au Centre des études sécuritaires et stratégiques au Sahel, Dr Aly Tounkara, affirme dans un entretien que les attaques contre les postes de contrôle et de sécurité par les terroristes devenues récurrentes au Mali constituent un signe d’affaiblissement des groupes radicaux. Les plus récentes ont eu lieu entre le 7 et 15 avril à Nossombougou, Hérémakono, Séguessona faisant au moins cinq morts et de dégâts matériels importants.

Les postes de contrôle et de sécurité sont de plus en plus visés par les terroristes. Qu’est ce qui explique cela ?

Ils visent les postes de contrôle et de sécurité parce qu’ils sont acculés. C’est un signe d’affaiblissement des groupes radicaux même si les attaques dirigées contre les postes de sécurités font plus peur aux communautés, mais à l’analyse, ça prouve à suffisance que les terroristes sont acculés par les réponses militaires. Ils seraient moins nombreux pour perpétrer des attaques ou des attentats d’une certaine envergure contre les installations militaires ou les symboles de l’Etat. Du point de vue analytique, c’est une bonne nouvelle lorsque les groupes terroristes sont dans une telle posture.

Comment peut-on contenir les mouvements de ces terroristes qui échappent aux mailles du filet de l’armée ?

Objectivement l’arme la plus redoutable c’est le renseignement humain. Parce que ce ne sont pas des acteurs qui sont structurés au sein de katibas importantes. Donc pour se rendre compte de leur mobilité, il faut forcément bénéficier du soutien des populations qui ne peut être obtenu que par des actions concrètes de l’Etat. Ces actions concrètes veulent tout simplement dire comment peut-on sentir l’utilité publique de l’Etat. Par exemple, dans ces localités que les représentants de l’Etat soient exemplaires dans leurs comportements. Que les représentants de l’Etat prouvent aux communautés par leur agir que la présence de l’Etat est utile en délivrant les services sociaux de base de façon désintéressée. Par exemple, que l’appareil judiciaire soit transparent et compréhensible par les communautés. C’est uniquement des actions comme ça qui peuvent amener les populations à même donner leur propre vie pour informer les forces de défense. Sinon ce ne sont pas des discours feront sentir aux communautés l’utilité sociale de l’Etat. Son utilité sociale se traduit par les actions concrètes et non dans la rhétorique.

Certains pensent que les agents aux postes ne sont pas assez vigilants pour empêcher les attaques. Alors quelle stratégie pour renforcer la sécurité dans ces endroits ?

Une des insuffisances, c’est l’incompréhension du phénomène par les forces de sécurité. Très souvent, on se rend compte que les militaires, les forces de l’ordre n’ont une compréhension fine du phénomène du terrorisme. Donc il faudra d’abord amener à comprendre d’abord le sens de la guerre asymétrique. Quand on parle de guerre asymétrique de quoi s’agit-il concrètement ? Quels sont les facteurs qui sous-tendent ce terrorisme ? quels sont les motifs à partir desquels on s’engage dans une action violente au nom de la communauté, de la religion ou une zone géographique. Ce travail de compréhension du phénomène n’est pas suffisamment fait auprès des forces de défense et de sécurité qui sont majoritairement à l’école de la guerre classique. Or le phénomène contre-insurrection est une autre école qui est enseignée à un niveau très élevé de la hiérarchie militaire. Les hommes qui sont dans les postes n’ont pas la chance d’accéder à ces enseignements.

Faudrait-il renforcer les effectifs dans ces postes pour faire face à la menace ?   

Malheureusement, aucun Etat ne peut être en mesure d’envoyer des hommes en nombre dans chaque checkpoint. Même les Etats-Unis ne pourraient assurer cela. Il faut une vigilance très soutenue au niveau de ces postes de contrôle et de sécurité. Il est inadmissible qu’un agent dans un environnement hostile soit muni de téléphone portable étant donné qu’il est en activité. Dans un environnement hostile, il est inadmissible qu’un agent cause avec des riverains ou que tous les agents dorment au même moment. Ce sont des comportements malheureusement qui n’ont été pas suffisamment corrigés avec cette insurrection menée par les groupes radicaux violents.  

Maliki Diallo

Diplômé de l'École supérieure de journalisme de Lille et de l'Université de Lille, Maliki Diallo est journaliste depuis 2012 au sein du Groupe Renouveau. Journaliste polyvalent, plusieurs de ses productions ont été récompensées au Mali et ailleurs.
- Le 13 novembre 2021, Prix (or) africain du journalisme d'investigation Norbert Zongo dans la catégorie télévision
- Le 29 décembre 2018, 2e lauréat du Prix national du journalisme sensible au genre
- 29 novembre 2019, 1er au prix de la Prévention de l'extrémisme violent au Sahel et dans le bassin du lac Tchad avec une enquête sur l'esclavage
- Août 2020, Prix Mali Média Awards catégorie télévision
- Août 2012, Mali Média Awards de catégorie presse en ligne