Elle est l’un des deux membres du Conseil national de transition a voté contre les lois d’amnistie des deux derniers coups d’État adoptées par 99 voix pour, deux voix contre et deux abstentions. L’adoption de ces deux textes, argue Ramata Diaouré, est une entorse à la justice et un autre coup à la démocratie.
Comme la lettre à la poste, les derniers coups d’Etat ( coup d’Etat du 18 août et la destitution forcée de Bah N’DAW) ont été amnistiés ce jeudi matin par le Conseil national de transition. L’adoption de ces textes par l’organe législatif de la transition protège les militaires auteurs de ces actes en moins d’une année d’intervalle contre toute action en justice.
Devant les membres du CNT pour défendre ces projets de loi, le ministre de la Justice, Mahamadou Kassogué, ancien responsable du Pôle économique financier de Bamako, considère les événements du 18 août comme un acte salutaire pour avoir évité au Mali une effusion de sang, une guerre civile…
Ainsi, soutient-il, les auteurs de ces faits méritent d’être blanchis par rapport aux actes qui ont été posés dans l’intérêt supérieur du pays et du peuple. Alors que beaucoup d’entre eux gèrent les affaires publiques, il était nécessaire de les mettre à l’aise contre le sentiment qu’ils soient susceptibles d’être poursuivis ou jugés, indique le magistrat.
En effet, après leur « acte », les colonels ont occupé plusieurs postes de responsabilité au sein de l’administration publique. Une militarisation des services publics dénoncée par des acteurs de la société civile et même le M5, avant de se voir confier la Primature, dans la mouvance de la ‘’rectification de la transition’’.
« Ces lois d’amnistie interviennent pour prendre en charge toutes ces préoccupations de réconciliation nationale et d’apaisement du climat social tout en permettant au pays de retrouver le chemin de la normalité. Dans ce contexte, adopter ces lois devient un acte d’apaisement, de réconciliation, de pacification du pays », a justifié le ministre de la Justice.
De même, il soutient que ces mesures taxées de prime à l’impunité trouvent aussi leur base non seulement dans la Constitution, mais aussi dans la Charte de la Transition en son article 23, et dans la volonté exprimée de la grande majorité des Maliens lors des concertations nationales.
Outre ces textes, le ministre de la Justice annonce des mesures de réparation et l’indemnisation des victimes liées à ces événements. En effet, lors des manifestations qui ont précédé l’arrestation de l’ancien président de la République, Ibrahim Boubacar KEÏTA, plusieurs biens privés et publics ont été saccagés. Les journalistes de l’ORTM notamment, dont les véhicules ont été détruits, attendent toujours réparation.
Cependant, le ministre a prévenu que les textes ne couvrent seulement que les faits qui y seront énumérés.
Si les lois d’amnistie n’encourageraient pas le coup d’Etat, pour Mahamadou Kassogué, en revanche Ramata Diaouré, l’un des rares membres du CNT à oser voter contre ces deux lois, soutient la thèse contraire.
« En tant que démocrate, je ne trouve pas normal que la justice ne passe pas quand certains actes sont commis. Dans le cas d’espèce, on blanchit des hommes pour des actes qui ont été commis », s’est-elle indignée.
La Transition censée de poser les jalons d’une véritable refondation n’est pas sur une bonne trajectoire, a estimé Ramata Diaouré. Elle estime que les auteurs des faits doivent répondre de leurs actes.
En lieu et place des auteurs, dénonce-t-elle, «c’est l’État qui va s’engager à assumer les conséquences financières des faits. Alors, je trouve que c’est anti-démocratique et n’envoie pas un bon signal à la lutte contre l’impunité ».
Plus grave encore, pour elle, c’est de soustraire déjà les présumés auteurs pour des affaires qui sont devant la justice.