Les Journées d’interpellations démocratiques (JID) sur les questions sanitaires initiées par l’ONG Save the Children, se sont tenues, les 22 et 23 mai 2021, dans les communes rurales de cercle de Kolondiéba.
C’est désormais une tradition perpétuée par Save the Children, à travers son projet de plaidoyer sanitaire, financée par la firme pharmaceutique GSK (Gloxon Smith Kline). L’exercice vise à contribuer au renforcement de la redevabilité locale au niveau des communes qui font face de nombreux défis en matière de santé, notamment la prise en charge du personnel sanitaire. Ainsi, les JID servent de cadre d’échange inédit entre les communautés, les autorités locales et les responsables des services sanitaires.
Pour cette édition, pendant deux journées marathon, des habitants des communes de Tiongui et Nangalosso, toutes du district sanitaire de Kolondiéba, ont égrené un chapelet de plaidoiries devant les responsables en charge de leur santé. Sur un ton libre, mais empreint de bonne humeur, les journées d’interpellations ont permis aux représentants de 23 villages (12 villages pour la commune de Tiongui et 11 pour celle de Nangalasso) d’évoquer diverses difficultés sur les questions sanitaires auxquelles font face les populations.
Des difficultés relevées
Les insuffisances relevées par les représentants des chefs de villages, des regroupements féminins et de jeunes étaient principalement relatives à l’accès aux services de santé, les problèmes de suivi des femmes enceintes ou encore le manque d’agents de santé communautaires (ASC). D’autres difficultés comme l’insuffisance des enseignants dans les écoles ou l’aide au démarrage d’activités génératrices de revenu, telle que le maraîchage pour les femmes, se sont invitées aux doléances, même s’elles n’avaient pas de lien avec le thème sanitaire des assises.
« Nos enfants tombent souvent malades, surtout le paludisme. Nous n’avons pas d’eau potable également. Au village, nous n’avons que deux pompes, dont une fonctionne. Il y a souvent des mésententes entre les femmes et même entre les enfants lors de la corvée d’eau », a interpellé Fatoumata Dagnoko, représentante des femmes du village de Niala, dans la commune de Tiongui.
Dans la commune de Nangalasso également, au deuxième jour des assises, les représentants de chacun des 11 villages ont martelé leur préoccupation sur le sujet aux autorités en charge du secteur. Dans les grandes lignes les inquiétudes se recoupent entre les communes voisines. Les récurrents problèmes d’insuffisances de centres de santé, d’agents et d’accès à l’eau potable sont les plus souvent pointés par les populations.
« Notre centre de santé n’est pas suffisamment équipé. Nous avons un problème d’eau potable d’où une multiplication des cas de paludisme. Nous demandons également aux médecins d’être plus compréhensive à l’endroit des malades », a lancé Soumaila Berthé, représentant des jeunes du village de Nangalasso.
En réaction aux interpellations des communautés, les présidents Asaco (Association de santé communautaire) et Falascom (Fédération locale des centres de santé communautaire) ont assuré que les solutions seront entreprises pour pallier aux difficultés signalées par les populations, notamment la résolution des problèmes d’électrification et le manque de médicaments dans les centres de santé. Au sujet du manque d’électricité dans les structures sanitaires, le président du l’Asaco de Tiongui a attiré l’attention des populations sur les défaillances des batteries et les panneaux solaires en période d’hivernage.
Abdou Koné, directeur technique du CSCom (Centre de santé communautaire) de Tiongui a indiqué que le gouvernement offre gratuitement de médicaments contre paludisme en début d’hivernage. Le médecin a donc appelé les populations à être assidus dans la prise des médicaments et de dormir sous les moustiquaires pour se prévenir le paludisme.
Chaka Dagnoko, maire de la commune de Tiongui a exprimé sa grande satisfaction d’avoir accueilli cette activité. « Au vue de l’importance de l’activité, elle doit être pérennisée et menée par les communes elle-même chaque année. N’eut été le manque de moins, je suis prêt à l’organisé chaque année dans ma commune », a assuré le maire de Tiongui. En réponse à certaines préoccupations des populations, Chaka Dagnoko a rétorqué les contraintes financières de la marie pour justifier la non résolution de certains problèmes comme celui de la dégradation des routes.
Impôts impayés aux mairies
« La mairie a besoin de soutien de la part des partenaires pour faire face à toutes ces difficultés », a-t-il fait remarquer. Selon les données de municipalité, la commune de Tiongui ne recouvre que 9 millions d’impôts par an. Pendant que le budget annuel de la marie est estimé à 100 millions de Fcfa, d’où un cycle d’endettement de la municipalité sur plusieurs années. Face à cette situation, le maire a rappelé l’importance du payement des impôts qui sont indispensables au financement des structures sanitaires et au payement des salaires des agents de santé communautaire. « L’accès au financement de l’Agence nationale de financement des communautés est également conditionné au niveau de payement des impôts par la communauté », a insisté le maire de Tiongui.
Les mêmes difficultés ont été exprimées par le maire commune de Nangalasso, Sékou Berthé. Pour l’élu, les populations ont tiré beaucoup d’informations de ces journées d’interpellations, tout en prenant compte de leur rôle dans le fonctionnement des services sanitaires au niveau communale. « Nous avons beaucoup appris à travers ses journées d’échange. De nombreuses incompréhensions qui existaient entre les autorités communales et les Asaco ont été débattues. Nous allons nous atteler à mettre en œuvres les recommandations formulées lors des assises », s’est engagé le maire de la commune de Nangalasso.
Satisfecit des participants
Des échanges qui ont été aussi appréciés du côté des responsables locaux de la santé. « Ces activités nous permettent de faire table rase, de rentrer dans les détails et de mettre chacun devant les responsabilités par rapport au problème de santé de la communauté. Nos attentes ont été comblées », a exprimé Dr Lassana Sissoko, médecin-chef du district sanitaire de Kolondiéba. Pour Dr Sissoko, les propositions des populations sont les bienvenues pour améliorer le service des agents de santé. « Ce genre de journée doivent nous inspirer, nous devons nous approprier de ce type d’initiative. Cela nous permet de résoudre beaucoup de problèmes liés au manque de communication entre agents de santé et population », a relevé médecin-chef.
Un satisfecit partagé également par Gabriel Théra, sous-préfet de Kadiana, dont relèvent les deux communes bénéficiaires. Pour le sous-préfet, les journées d’interpellations démocratiques sont « une très bonne initiative qui doit être pérennisée par Save the Children ». « Depuis la décentralisation par notre pays, les services de santé ont été transférés aux collectivités, donc c’est une bonne chose de voir les populations interpeller leurs responsables sur les problèmes auxquelles elles sont confrontées », a expliqué M. Théra. Et le sous-préfet de poursuivre : « les organisateurs doivent accentuer ce type d’activité. Nous demandons à Save the Children de continuer à aider les autorités dans ces domaines prioritaires comme la santé pour le bien des populations ».
Des recommandations
À la fin des échanges, les membres du jury ont proposé de nombreuses recommandations. Au nombre de celles-ci figurent, notamment, le besoin de coupler la vaccination stratégique et la pesée des femmes enceintes. Les assises ont aussi recommandé aux populations de se rendre à temps dans les structures de santé, par ailleurs il a été demandé d’accentuer l’aide aux agents de santé communautaire tout en les déployant dans les endroits où les besoins sont urgents. Ce qui amènera le chargé du projet de plaidoirie de Save the Children à Kolondiéba, Dr Mahamadou Diakité, à inviter les populations à s’approprier les recommandations des journées d’interpellations afin qu’ils obtiennent plus de satisfaction des services de santé communautaires.
Mohamed Touré